#22 — Le cliché de la basse lamentable

En ce solstice d’hiver, descendons le long de l’échelle dans les bas-fonds de la terre, dans le sol mineur, dans les root notes. On pourra pour cela emprunter le chemin connu de la “basse des lamentations”, une figure mélodique descendant progressivement l’intervalle d’une quarte, visant à produire son petit effet neurotoxique d’extase et de dépression, à une époque où il n’était pas toujours facile de se procurer de l’opium. Ce motif émotif est vieux de plusieurs siècles, on en trouve déjà la trace au début du XVIIe siècle chez Monteverdi, dans son “Lamento della Ninfa” ou dans le fameux “Dido’s Lament” de Purcell, l’aria de fin de “Didon et Énée” intitulé “When I Am Laid in Earth” — impossible de descendre davantage.

En italien, le “pianto” (les pleurs) est associé à la seconde mineure descendante, tandis que le “passus duriusculus” (passage difficile) consiste à descendre la quarte dont nous parlions de manière chromatique, c’est à dire demi-ton par demi-ton.  Ce motif est même la signature d’un genre musical comme la chaconne et la passacaille, qui utilisent généralement (quoique pas systématiquement) cette basse descendante comme colonne vertébrale. Ce qui est fort pratique, c’est que lorsqu’on descend ainsi d’une quarte, on se retrouve sur la quinte (j’en vois au fond qui ne suivent plus), ce qui permet ainsi de réaliser une petite cadence, un bon vieux V-I diront celles et ceux qui jazzent, pour retomber sur ses pattes, sur la tonique, après cette douce chute du 4ème étage (et on remarquera ici que “cadence” est issu du latin “cadere”, chuter).

Bref, tout ça pour dire qu’on l’aime bien, cette petite descente de quarte. On la retrouve dans d’innombrables compositions, harmonisées de diverses manières, tantôt diatonique (à la Monteverdi), tantôt chromatique (à la Purcell), ou parfois tronquée, ne descendant que d’une tierce.

On l’entend par exemple dans Michelle et While my Guitar Gently Weeps des Beatles, “Babe I’m gonna leave you” de Led Zep, 50 ways to leave you lover” de Paul Simon,  “7 seconds” de Neneh Cherry & Youssou’n Dour, “Mad about you” de Hooverphonics, ou encore dans “Ike’s rap 2” d’Isaac Hayes, repris dans le “Glory Box” de Portishead,  et caetera, et caetera, et caedere, et caedere.

En voilà encore un autre, peut-être moins connu que les exemples sus-mentionnés, dans ce titre “Burnin’ Love” de Black Grass, paru en 1976  et samplé en 1999 par un duo de rappeurs californien.

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#21 — Broken flowers

Vous connaissiez peut-être les Tokyo Cuban Boys qui ont accompagné la grande Chiemi Eri, mais connaissiez-vous le Tokyo Ska Paradise Orchestra ? Si vous avez suivi les JO de Tokyo en 2020, vous les avez vus jouer durant la cérémonie de clôture, dans un stade complètement vide. Oui, c’est bien ça : un concert de ska, joué par un groupe japonais, dans un immense stade complètement vide, retransmis à la terre entière, et cela 75 ans jour pour jour, après que d’autres humains aient envoyé deux bombes atomiques sur ce pays. Un événement éminemment chargé de sens pour nous, humains, mais je veux bien croire que les autres espèces animales de notre planète aient parfois du mal à nous suivre.

Le TSPO commença en 1988 comme une fanfare de rue, sous l’impulsion du compositeur et percussionniste Asa-Chang. Mais ce dernier quitte le projet dès 1993, lassé de poum-tchaker, pour se lancer dans un nouveau projet plus solo: “Asa -Chang & Junray”. Il se fait aider par le guitariste et programmeur Hidehiko Urayama pour concevoir la “Jun-Ray Tronics“, un échantillonneur qui déclenche des sons à partir de la percussion captée en live. Le tabliste U-zhaan rejoint Asa-Chang en 2000 et ils sortent ensemble ce titre “Hana“— “Fleur” en japonais. Si vous ne parlez pas japonais couramment, voilà une traduction des paroles, avec toutes les réserves possibles sur ce qu’on peut attendre d’une traduction faite par une IA. Dans tous les cas, il y est question de fleur et d’un traumatisme lié à aux ténèbres qui ont suivi un “vent terrifiant”, pas de doute, on est bien au Japon.

Une fleur s’est éclose
Terriblement effrayée par le vent
Une fleur que personne n’avait jamais auparavant
S’est éclose

Je croyais qu’aucune fleur ne pourrait se trouver là…
Et puis… alors que je pensais ainsi, il y eut une fleur
Une fleur que personne n’avait vue auparavant,
Une fleur qui ne pouvait pas être vue,
Une fleur qui ne pouvait éclore,
A éclos

Elle est là cependant, elle est là, c’est certain
Une fleur s’est éclose, terriblement effrayée par le vent
Une fleur que personne n’avait jamais auparavant
A éclos

La fleur se balançait, secouée par le vent
Terrifiée et chancelante
Le vent soufflait
Emportant avec lui les fleurs et les rumeurs
Et la fleur était si terrifiée par ce vent
Terrifiée, tremblante, chancelante, secouée

La fleur pleurait, battue par le vent
Cette fleur qui n’avait jamais vu la lumière
Pleurait
Plus encore que le bruit du vent,
Le vent du bruit.
Tempête sur tempête sur tempête sur tempête
Et puis… et puis… la fleur… la fleur…
Pleurait.

Plus de rêves. Plus de vent.
Les nuages non plus ne bougent plus.
Et pourtant, et pourtant, et pourtant…
La fleur choisit les ténèbres
Elle aime cette obscurité et y pleure
Elle pleure dans les ténèbres
Et pourtant, et pourtant, et pourtant…
La fleur était née pour pleurer dans les ténèbres
Elle est choisie, célébrée et aimée
Cette fleur qui n’avait jamais vu la lumière est choisie
Elle est choisie, elle est célébrée, elle est aimée
Elle semble avoir aimé l’obscurité

Ô fleur au cœur indomptable
La lumière sourit devant ton obstination
Que le vent n’ébranle pas
Que l’obscurité ne fait pas pleurer
Qui résiste à la coupe de celui qui aiguise ses ciseaux

Ô fleur! Regarde la lune, pas les étoiles
Ô obscurité! La lune est la vraie lumière
Certes, les étoiles sont belles aussi
Mais les ténèbres, comme la lumière des étoiles
Ne sont pas bonnes
La lune est la vraie lumière.
Alors
Repousser les vagues de l’obscurité
Que la lune des ténèbres soit révélée
Que la lumière brille sur cette fleur
C’est ce que je souhaitais.
Et puis… et puis… et puis
La fleur a répondu
Elle a répondu juste une fois
Elle a répondu quatre fois
“Je ne veux pas de lumière, mais de l’eau s’il te plait!”

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#20 — Vive le vent d’hiver

Les Études de Chopin sont un ensemble de pièces majeures pour le piano, publiées en deux opus no 10 et no 25, qui ont donné leurs lettres de noblesse à cette forme originellement destinée à l’exercice. La plus populaire d’entre elle est sans doute l’étude no 3 en mi majeur du premier opus, nommée “Tristesse“, qui sera reprise par Tino Rossi dans sa chanson du même nom, puis par Gainsbourg dans “Lemon incest“.

Dans le second opus, on trouve l’étude No. 11 “Le vent d’hiver”, dont l’interprétation requiert une assez certaine souplesse des doigts. Écoutez bien ce déferlement de notes après l’introduction, qui s’abat sur nous comme une tornade de neige… L’auriez-vous déjà entendu ailleurs?

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#19 — Traffic / jam

Je me souviens d’une étude scientifique dont m’avait parlé un collègue, visant à modéliser mathématiquement le trafic à Bombay, pour comprendre comment la circulation parvient à rester fluide en Inde avec un millier de voitures, quand elle se fige à Paris avec seulement trois. Pour ce qui est de Paris, les causes sont assez claires et modélisable avec un jeu réduit de paramètres. Mais je n’ai pas réussi à retrouver la trace de cette étude sur Bombay. Peut-être que les mathématiciens chargés de la modélisation ont simplement jeté l’éponge.

L’auditeur attentif notera que la communication acoustique joue un rôle aussi subtile qu’important dans cette affaire. Les scientifiques chargés de ladite étude auront peut-être minimisé la sophistication de ce langage non-verbal, qu’on pourra rapprocher, toutes choses égales par ailleurs, du chant des oiseaux. En l’occurrence, une espèce particulière d’oiseaux sur le cul desquels de belles plumes aux couleurs chatoyantes font apparaître ces trois mots:  “Horn OK please“.

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#18 — Platine et résurrectine

LaDonna Adrian Gaines, plus connue sous le nom de “Donna Summer”, n’a pas adopté ce nom de scène pour sa disposition à chanter des tubes de l’été (comme je l’ai longtemps cru), mais en raison d’un bref mariage avec un dénommé “Helmuth Sommer” et des conseils de Giorgio Moroder et Pete Bellotte, les producteurs notoires de l’essentiel de son répertoire. Donna est à l’été de son succès quand elle sort l’album “Bad Girls” en 1979, sur lequel figure “Hot Stuff“, qui ouvre l’album et sera l’un de ses plus gros tubes, mais on trouve aussi ce “Walk away”, plus en retenue, et qui referme le sillon de la face A.

De son côté, sans connaitre le succès fulgurant de la Donna, J.R. Bailey  joua quelque beaux seconds rôles en backing-vocals d’Aretha Franklin et Roberta Flack. Il publia également deux albums solo sur le premier desquels on trouve ce “After Hours” sorti en 1974:

Le morceau commence par une petite intro en Si bémol mineur, qui ne dure que le temps d’une petite montée en arpèges sur quatre mesures, pour finalement basculer en Fa mineur, qui est la tonalité principale de ce morceau. Un moment transitoire donc, mais un moment amené à durer…

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#17 — Piano hero

On classe souvent le compositeur Michael Nyman aux côtés de Steve Reich et Philip Glass, parmi les minimalistes. Comme il parait que Nyman, également musicologue, serait le premier à avoir employé ce terme dans le domaine de la musique, on lui laissera le soin de se coller lui-même, ou non, une telle étiquette. C’est la moindre des politesses.

Il partage au moins avec Glass un intérêt pour la musique de film, mais il a encore davantage écrit pour le cinéma que son collègue, en particulier pour les films de Peter Greenaway, avec qui il collabore à six reprises, composant notamment ce “Fish Beach” utilisé dans deux de ses films (hello again Jay-Jay!).

Nyman est également l’auteur de la partition de “La leçon de Piano” de Jane Campion, toute première palme d’or décernée à un film réalisé par une femme (encore qu’elle aurait pu dire “me too”, l’ayant gagnée ex-aequo avec le réalisateur Chen Kaige). Le film fait carton plein à tous les festivals: on récompense sa réalisation, son interprétation, ses décors, ses costumes et sa musique, dont la BO se vendra plutôt bien, contribuant à faire connaître Nyman à un plus large public que le club select des fans Greenaway. On y trouve notamment ce “Little Impulse” suspendu au dessus du temps — un thème qui vous reste dans la tête autant qu’il s’avère compliqué de  le chanter pour l’en faire sortir, agissant ainsi, par infusion sous-cutanée.

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#16 — Le premier qui rira

On ne compte plus le nombre de westerns qui ont été repiqués dans des titres de hip-hop. Il faut dire que le minimalisme des dialogues dans ces films est favorable à la punchline. On parle peu, mais quand on le fait c’est pour tirer à balles réelles et mieux vaut viser juste pour ne pas finir du côté de ceux qui creusent. Les pochettes de disques de rap empruntent d’ailleurs beaucoup aux codes de l’affiche de western: une pose de bad-boy en légère contre-plongée, un rictus exprimant un subtil mélange de dédain et d’indifférence totale, et le regard de celui à qui on ne la fera pas au jeu du premier-qui-rira-aura-une-tapette. L’affiche de “Preparati la bara!” (“Django, prépare ton cercueil!” en français), western-spaghetti sorti en 1968 avec l’inénarrable Terence Hill n’y fait pas exception et son thème principal nous prend d’ailleurs pour des pieds-tendres avec son titre: “You’d Better Smile”.

Comme si on allait se laisser avoir! Ha ha ha!…

Et pan.

Ce sont les frères Gianfranco et Gian Piero Reverberi qui composent la bande originale, et parmi les diverses variations du thème le long du film, on trouve ce “Il Carico dOro” — “La cargaison d’or”. Une information qui ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd, mais dans celles du beatmaker d’un duo issu de la “Dirty South“, cette mouvance du hip-hop émergeant dans la poussière du sud des USA dans les années 1990, en marge de l’East et la West coast qui dominent l’industrie musicale.

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#15 — L’interprétation des rêves

Comme nous parlions hier de l’univers onirique de ce cher Jay-Jay, voilà une lettre d’amour sortie en 1998 sur “Tattoo”, son second album.

Jay-Jay y rend hommage à sa belle d’un pied léger, et pour une fois, paraîtrait presque joyeux. On le devine, au soleil couchant, rentrer à cheval dans son home sweet home et prendre sa plus belle plume pour écrire à sa Lulu, tandis que son chat se love dans un fauteuil au coin de l’âtre.

À mille lieues de la chaumière paisible de Johanson, le  chanteur Cee-Lo est lui dans la jungle tourmentée de son “Open Book“. Il se démène comme une bête sauvage face aux esprits vaudous et aux vautours qui rodent, jouant son va-tout à livre ouvert et poing fermés, dans la toile tumultueuse de Danger-Mouse, qui tisse le son des Gnarls Barkley.

Entre la lettre de Jay-Jay et le livre de Cee-Lo, saurez-vous deviner l’encre qui relie ces deux chansons apparemment si éloignées?

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#14 – Désordre affectif saisonnier

Quand Claude Lelouch réalise “Un homme et une femme” en 1966, il ne s’attend probablement pas à la pluie de récompenses qu’aura son film: Palme d’or et prix du jury catho à Cannes, deux Oscars, deux Golden Globes et le BAFTA pour Anouk Aimée… Il ne s’imagine peut-être pas non plus que ce sera le premier épisode d’une trilogie, peut-être la plus longue de l’histoire du cinéma. Avec “Un homme et une femme : Vingt ans déjà” en 1986, puis “Les Plus Belles Années d’une vie” en 2019, le couple Anouk Aimée / Jean-Louis Trintignant, se retrouve à trois âges de la vie, avec 56 ans d’écart entre le premier et le dernier volet. Même George Lucas n’a pas réussi à suivre Harrison Ford aussi longtemps (ou pas encore du moins).

Francis Lai signe la musique de ces trois films et n’aura que ses yeux (et ceux du public) pour pleurer l’absence de récompense de cette BO mémorable. Le jury des Golden Globes et des Oscars, en rupture de stock de mouchoirs, lui lâcheront le prix de la meilleure musique originale quatre ans plus tard pour la BO de Love Story d’Arthur Hiller, conscients qu’ils ont quand même un peu raté le coche sur le film de Lelouch avec ce thème chanté par Nicole Croisille et Pierre Barouh:

S’il vous reste encore quelques larmes, il vous faut aller d’urgence faire contrôler votre cœur chez un marbrier. Voilà une version orchestrale dans laquelle les cordes finiront de vous nouer les tripes. Bien fait pour vous.

Vous sentez maintenant une légère dépression arriver par le quart nord-ouest, qui remonte le long de la côte du Cotentin et s’accompagne d’un crachin normand qui humidifie  le pourtour de vos yeux. Vous vous sentez peut-être nostalgique de choses que vous n’avez même pas vécues, et c’est bien normal, on vous donne l’explication ci-dessous…

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#13 — Lost and founds

James Bullough Lansing. Ce nom ne vous dit peut-être rien, mais si vous êtes un tantinet audiophiles, vous en connaissez sûrement les initiales: JBL.

Né en 1902 dans un trou paumé de l’Illinois, James Martini (de son vrai nom) bricole dès son adolescence des bouteilles de Leyde “pour faire des blagues à ses potes”, ainsi que des postes à galène suffisamment puissants pour que la Marine de Chicago repère ses ondes radio et viennent démanteler son matériel. Un geek, un vrai. Sa mère rejoint les morts le jour de leur fête, et James alors âgé de 22 ans part pour Salt Lake City. Il y rencontre son épouse et son futur associé Ken Decker, puis déménage à Los Angeles, et change son nom de “Martini” en “Lansing”. On ne sait pas trop pourquoi… “parce que ça sonnait mieux pour une marque de Hi-Fi” prétendront certains. D’autres auraient pu dire que porter un nom italien dans l’Illinois du début du XXe siècle ne facilitait pas toujours les affaires, mais ils parlaient plus bas. Et on ne les a jamais retrouvés.

James créé donc sa première boite à 25 ans à L.A., la Lansing Manufacturing Company, rachetée en 1941 par Altec pour devenir Altec Lansing, et dont il partira après la fin de la guerre pour créer JBL. Les bons bricoleurs n’étant pas toujours bons en affaires, James Bullough Lansing se suicidera en 1949 à la suite de problèmes personnels et financiers. Mais l’entreprise lui survécu et entrepris diverses collaborations avec l’industrie musicale. Des amplis de guitares de Léo Fender, à la prestation sono pour de nombreux festivals, en passant par le “Wall of Sound” des Grateful Dead, JBL produira également un certain nombre d’enregistrements, en particulier pour tester et faire écouter la qualité de ses enceintes. C’est le cas de l’enregistrement ci-dessous, un quadruple vinyle contenant tout à la fois des sons de test, diverses explications fournies sur des questions de rendu sonore, mais aussi des enregistrements d’une session de répétition des musiciens de Hoyt Axton, un acteur et chanteur de blues-rock qui connut plus de succès outre-atlantique que chez nous, mais que vous avez peut-être vu dans les Gremlins, il y joue le père de famille.

À la 51’28” minute, on entend le pianiste Dave Jackson jouer un riff pendant quelques secondes. Juste un truc essayé comme ça, pour s’entendre avec les autres musiciens sur la mesure dont on est en train de parler à ce moment là — un de ces moments fugaces où se créée une chanson, mais qui est tout de suite interrompu par des discussions et qui finira dans les oubliettes de ce disque de test audio…

Dans les oubliettes?

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